Alain Rousseau le peintre du chromobscur

Critique d’art Barbara Aust Wegenbuch

 Travaux récents d’Alain Rousseau en Chine.

 

Par Dr. Barbara Aust-Wegenbuch, critique d’art.

Copyright Alain Rousseau, L’empereur, huile sur toile, 100 x 120 cm, 2014

 

Copyright Alain Rousseau, Noire attitude, huile sur toile, 80 x 80 cm, 2014

Depuis Esope, voire même bien avant, la littérature est pleine de références à certaines caractéristiques animales et à la manière dont elles s’apparentent aux humains.  Dès lors il n’est pas surprenant que nos personnalités partagent des attributs d’animaux, certains encore plus que d’autres. L’anthropomorphisme, que l’on qualifie quelquefois de personnification est un moyen littéraire bien établi qui remonte à la nuit des temps,  voire à une époque antérieure aux Fables d’Esope datant du 6ème siècle, avant JC en Grèce.  Les Grecs utilisaient des animaux anthropomorphes (c’est à dire des animaux qui prenaient la forme et l’apparence humaine) pour illustrer certains principes de la vie.  Beaucoup de stéréotypes animaux qui existent encore aujourd’hui, peuvent être trouvés dans ces collections, comme : “rusé comme un renard” “fier comme le lion”. Les anthropomorphismes qu’Esope utilisaient au premier siècle de notre ère étaient tellement utilisés et familiers qu’ils ont influencés la pensée des philosophes à travers les âges.

Le français Alain Rousseau est un artiste contemporain qui est n’est pas seulement familier de la psychologie mais aussi impliqué par ces thèmes dans la création de ses séries de peintures à l’huile.  Il vit et travaille en Chine et peint essentiellement des êtres vivants qui sont des études morphologiques visant à ressentir les sentiments et à partager les émotions des êtres.  Il les peints avec un style des plus expressif, nous invitant à dialoguer avec eux.

Il est important de mentionner qu’avant de commencer sa carrière artistique, Alain Rousseau a dû consulter et disséquer de nombreux dossiers de candidats qu’il envisageait pour pourvoir des postes en entreprise.  Il devait alors faire appel à ses connaissances en morphopsychologie et en physiognomonie.  Alain Rousseau a œuvré comme Directeur des Ressources Humaines pour plusieurs entreprises d’envergure internationale dans lesquelles Il était responsable du choix de plusieurs membres de l’équipe de direction.  Le visage constitue donc, pour lui, un vecteur de sens lui permettant de déchiffrer les personnalités. Tout en développant ses concepts artistiques, Alain Rousseau nous explique ce qu’il y a derrière ces séries de tableaux. « Il y a des similitudes dans la façon dont nous observons le coq ou le cheval qui peuvent avoir l’œil impérial, une posture dominatrice ou bienveillante.  Durant mon processus de création, il m’arrive de penser à une personne mais c’est un coq que je peins parce qu’ils ont un profil similaire.  Pour ce qui est des gens qui fument, j’observe leurs attitudes, étudiant les codes sur la façon de tenir leur cigarette qu’elle soit entre leurs doigts ou dans la bouche et j’utilise la symbolique de ces attitudes dans mes compositions. »

Alain Rousseau est un artiste peintre français diplômé d’un baccalauréat ès art en architecture, dessin et peinture de l’université Saint-Luc (Belgique).  Il a poursuivi ses études et obtenu une maitrise en communications à l’Institut des Médias et Relations Publiques (Belgique).  Il est aussi détenteur d’une maitrise en Economie et Administration des Entreprises de la prestigieuse Université Paris-Dauphine (France).  A l’école des arts de Strasbourg (France) il a suivi la classe du peintre Français Pascal Antony, lui-même ancien étudiant du célèbre peintre Italien Paolo Conti, de l’Academia di Bella Arti de Florence (Italie).

Il vit en Chine depuis plus de six ans et enseigne à l’université du Sichuan. Engagé dans les arts et la culture en France et en Chine, il est membre de l’Association des artistes de Chengdu et de l’Académie de peinture à l’huile de Chengdu.  Parmi ses innombrables expositions il nous faut mentionner celle de Bastille, Paris (France), le marché de l’art de Strasbourg (France), le musée XLY MOMA à Chengdu (Chine), le musée de Taiyuan dans la province du Shanxi (Chine), le musée Chengdu Shi Mei shuguan à Chengdu et le musée provincial de Chengdu (Chine).

réveil matinCopyright Alain Rousseau, C’est l’heure, huile sur toile, 80 x 80 cm, 2014

Concernant sa technique, disons qu’elle est interpellante; ses toiles se concentrent sur la psychologie du sujet en couleurs vives sur fond monochrome noir.  L’artiste appelle son style le “chromobscur” basé sur deux éléments: Le premier, le fond, inspiré des peintres espagnols et flamands du 16ème siècle incluant le clair-obscur est sombre et non figuratif. Pour le second, Alain Rousseau utilise des couleurs vives voire violentes rappelant les manières de l’Impressionnisme et du Cubisme pour bousculer les conventions.  Durant ses études il a été influencé par l’histoire de l’art, l’architecture ainsi que par certains films cultes tels que: “La chevauchée fantastique” de John Ford, « Le Cuirassé Potemkine » de Sergei Eisenstein; « Les Sept Samouraïs d’Akira Kurosawa. Il est aussi influencé par son expérience professionnelle acquise dans les studios de télévision, sur les plateaux de tournage, durant les séances de photos, le multimédia, le journalisme et la publicité en général.

couronne de l'emepereur de la basse courCopyright Alain Rousseau, Crête impériale, huile sur toile, 100 x 120 cm, 2014

Alain Rousseau a récemment peint une série de coqs aux titres évocateurs: “Crête Impériale”, “C’est l’Heure” et « l’Empereur ».  Ce dernier, « l’Empereur », représente à la fois le talent et l’excentricité d’une personne.  Ces caractéristiques rendent la vie intéressante pour nous tous.  L’esprit de ce volatile est constamment à la recherche de stimulations et son comportement est caractérisé par une conduite très énergique.  Les coqs de Rousseau ont une allure théâtrale adoptant les toutes dernières tendances de la mode. Ils ont un intense besoin d’attention ce qui leur vaut les critiques de leur entourage proche ainsi que celle d’être le centre de toutes les attentions pour pénétrer leur vie active. L’esprit actif de ce coq est toujours à la recherche d’une manière le créer plus de drame dans sa vie.

« Crête Impériale » semble plutôt être un vendeur capable de vendre tout et n’importe quoi, de l’immobilier aux voitures d’occasions.  Travailleur acharné et infatigable il a le souci du détail.  Sa créativité et sa loyauté font de lui un employé formidable. Lorsque le coq est directeur ou propriétaire d’une entreprise il devient pointilleux; son enthousiasme débordant finissant par aliéner ses subordonnés.  Le coq n’est pas particulièrement un joueur d’équipe il est perçu comme étant égocentrique et moralisateur ce qui lui vaudra le ressentiment de ses pairs. Avec la toile “C’est L’heure”, Alain Rousseau souscrit à cette maxime bien connue: “l’avenir appartient à ceux qui se lèvent tôt”.  Le coq se lève un peu plus tôt que ses compétiteurs et pourrait aussi être accusé d’être un peu “touche à tout”.  Pour le coq le monde est à ce point fascinant que de se confiner à une seule et même carrière pour la vie serait impensable. Cependant ce coq peut réussir s’il en choisit une présentant une grande variété de challenges  comme  l’édition, le journalisme ou le métier d’acteur.

supérieure et sur d'elle memeCopyright Alain Rousseau, La dominatrice, huile sur toile, 100 x 120 cm, 2014

Dans “Noire Attitude” Alain Rousseau a su donner à la femme qui fume un regard mélancolique.  Pour “La Dominatrice” l’artiste rend la femme plus masculine.  Il réussit ce tour de force en lui peignant une mèche de cheveux abondante qui lui descend sur la figure.  Alain Rousseau utilise aussi une couleur similaire et la force du pinceau pour nous donner l’impression qu’elle a des cheveux implantés sur le visage. Il va plus loin et renforce son attitude  masculine par la façon dont elle met sa cigarette dans sa bouche.  Clairement il s’agit là d’un symbole de puissance et d’indépendance. Cette cigarette représente le symbole de la femme qui se bat pour obtenir sa liberté économique et politique. Ces deux toiles nous présentent  des femmes instruites de la classe moyenne qui affirment leurs droits en faisant ce qui leurs plait sans se soucier que ce soit ou non conforme aux conventions de notre société.

Les couleurs dominantes de cette série sont le pourpre impérial sur fond noir mélangés avec une alternance  de pourpre impérial et d’éléments rappelant l’or Byzantin tel des mosaïques; on les retrouve aussi dans le magnifique plumage des coqs.  Ces couleurs sont typiquement associées au pouvoir royal de Byzance.  Les sujets sont placés au centre de la toile ce qui les rend plus grands.  L’utilisation de la peinture à l’huile sur une grande toile est un choix délibéré. En raison de leur taille les portraits sont positionnés à hauteur de spectateur. Après un examen plus approfondi, l’image renvoie aux qualités possédée par l’œil ou à l’objectif d’un appareil photo zoomant sur le sujet. Il s’agit d’une étude de la relation entre la chair et l’individu qui est un facteur significatif de la peinture de toutes ces toiles. Enfin par  l’utilisation du noir en toile de fond, créant un fond neutre, le travail tente de faire ressortir la même qualité visuelle que l’on retrouve sur les photos instantanées; ces dernières refusant toute interprétation spécifique. Cette volonté de rejeter d’autres accessoires visuels et le symbolisme qui caractérise les toiles de l’artiste contraignent le public à se mettre en position de responsabilité et à faire face à cette réalité que “nul homme est une île”

Les toiles d’Alain Rousseau sont empreintes de sympathie et d’ironie.  On ne peut cependant en dégager un sentiment d’ordre général.  L’authenticité de ses portraits domine son œuvre.  Il se dégage de ses toiles une spécificité d’expression et ses coups de pinceau énergiques nous offrent des portraits tout simplement extraordinaires.  Il est clair que c’est cette recherche de la vérité sans faille qui définit le mieux le travail d’Alain Rousseau.

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Dr. Barbara Aust-Wegemund

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About the Author:

Dr. Barbara Aust-Wegemund, née à Zurich/ Suisse  est historienne de l’art  et Directrice générale d’Art History Consulting (AHC). Elle a étudié l’histoire de l’art  à l’Université  Christian-Albrechts de  Kiel (Allemagne), à l’Université pour étrangers de Perugia (Italie) et à l’Université  Guildhall de Londres (Grande Bretagne).

En 2002 elle a obtenu un PhD de  l’Université de Kiel avec une  Dissertation sur la sculpture moderne: “Sources d’ Inspiration. Le sens de la  nature dans les derniers travaux d’ Henry Moore.” Barbara est une historienne de l’art et une critique d’art qui a beaucoup écrit sur  l’art moderne et contemporain.  Ses dissertations ont figurés dans des monographies, des catalogues d’expositions, des e-magazines, des journaux et au Goethe Institut Inc.